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Massimo Bartolini : « Quand on partage le même objectif, on finit par se comprendre. »

Passé par le rallye et la Formule 1, Massimo Bartolini a passé une vingtaine d’années au service course Ducati. Recruté l’an dernier par Yamaha, et nommé directeur technique du projet MotoGP, cet ingénieur italien s’efforce aujourd’hui de coordonner le travail entre l’Europe et le Japon pour Yamaha Motor Racing.

Pourquoi avez-vous décidé, il y a un peu plus d’un an, de quitter Ducati pour rejoindre Yamaha ?

Pour le défi. Et aussi pour comprendre. Si les constructeurs européens ont aujourd’hui pris l’ascendant et dominent le championnat MotoGP, cela n’a pas toujours été le cas. Bien au contraire. Les Japonais ont eu l’avantage durant, disons, quarante ou cinquante ans. Au cours de ces années, de l’extérieur, de l’Europe, leur domination fascinait. Il y avait beaucoup de légendes sur la façon des Japonais de penser et de construire les motos. Pouvoir appréhender tout cela de l’intérieur m’intriguait, j’étais curieux de comprendre, et je trouvais très intéressant de pouvoir découvrir une autre culture et une autre façon d’aborder le développement d’une moto d’une course. Quand on m’a proposé ce poste, je sentais qu’il y avait aussi de leur part l’envie de tirer le meilleur de nos deux cultures. Ils ont des points forts, nous en avons aussi. L’idée était de pouvoir les réunir pour obtenir de meilleurs résultats.

Chez Ducati, vous étiez responsable de la performance. Quelle est votre fonction exacte chez Yamaha ?

Je suis directeur technique, mais dans les faits ma fonction est similaire à celle que j’exerçais avant. Dans une entreprise comme Yamaha, divisée sur plusieurs parties du monde, le directeur technique n’est pas ce qu’on imagine dans une société européenne où le poste est celui de quelqu’un qui gère le quotidien, qui organise les départements, les groupes de travail... Ma tâche est un mélange entre le côté axé sur la performance et le côté plus technique. J’essaie de donner des orientations. Je me rends régulièrement au Japon, mais je ne peux pas y être en permanence.

Comment se passe la communication avec le Japon ?

Quand ils parlent compétition, les techniciens parviennent toujours à se comprendre, quelle que soit la langue parlée. On dessine aussi beaucoup. Bien évidemment, comme je l’ai dit, il y a des différences de culture qui font que l’on n’aborde pas toujours les problèmes de la même manière. La façon de réagir, d’aborder le travail quotidien, le niveau de précision… Oui, il y a des différences dans notre approche, mais quand on partage le même objectif, on finit par se comprendre. Peut-être que le plus difficile avec les Japonais est de leur faire changer d’idée quand ils sont convaincus de quelque chose. Mais honnêtement, je ne sais pas si dans ce domaine nous sommes très différents.

Qu’avez-vous appris d’eux ?

Techniquement, il y a des domaines où ils sont très forts, étonnamment forts. Et d’autres où, je ne dirais pas faibles… Mais disons moins exigeants. Par exemple ils sont très bons en matière de châssis et de moteur, notamment en termes d’usage du moteur. Honnêtement, je ne m’attendais pas à cela. Ils ont leur propre idée sur la manière de fabriquer un moteur, et ils en sont très fiers. C’est quelque chose qui a de la valeur, parce que je pense que si demain on supprimait l’électronique, leur moto fonctionnerait. Je ne suis pas certain que cela serait le cas pour les autres. A côté de cela, ils sous-estiment complètement l’effet de l’aérodynamique. Ils en voient l’impact, mais ils ne s’en soucient pas. Aujourd’hui ils y font d’avantage attention, et cela commence à se ressentir. Après il y a l’électronique que l’on peut et que l’on doit améliorer, notamment dans la façon de gérer le logiciel unifié.

Comment voyez-vous l’évolution de la M1 depuis votre arrivée chez Yamaha, et que peut-on en attendre à court terme ?

Cette moto n’a pas de réel défaut, elle n’a pas de point clairement négatif. Mais nous devons améliorer différents domaines. C’est pour cela que nous travaillons sur le châssis, l’aérodynamique, l’électronique… Nous avons aussi fait évoluer la structure qui développe la moto, certains départements devant évoluer pour se hisser au niveau qu’exige le MotoGP actuel. Nous avons deux projets en route dans la perspective du nouveau règlement technique qui entrera en vigueur en 2027. L’un autour du moteur quatre cylindres actuel, l’autour d’un moteur en V. C’est très intéressant, mais il faut faire attention pour éviter la confusion.